lundi 27 avril 2015

Ho-Chi-Minh et le sud

De retour sur Ho Chi Minh nous prévoyons déjà notre excursion à venir : les tunnels de Cuchi, prévue le lendemain. Après deux bus locaux où nous nous sommes sans doute fait escroquer, nous y voilà.

Il s’agit en fait d’un réseau de galeries souterraines, creusées par les maquisards des années 1940 luttant contre les français (la guerre d’Indochine) puis largement étendues (passant de 17 à 200Km…) par les Vietcongs dans les années 1960, afin de résister à la puissance Américaine (la guerre du Vietnam).


Ces tunnels donc, dont les entrées étaient fermées par des trappes dissimulées sous des feuillages, étaient construits sur plusieurs niveaux et se comportaient telle une petite ville. D’étroites galeries (70cm de large pour 90cm de haut) s’enfonçaient sur plusieurs niveaux entre 3 et 9m de profondeur, reliant de véritables petites salles (bunker avec fenêtre de tir, salle de commandement, cuisine, infirmerie…). Ces galeries permettaient aux soldats viet’ de s’enfuir pour échapper à l’ennemi ou plus fréquemment de passer furtivement à l’attaque. Un soldat américain écrira même : « Ils sont partout à la fois ! ». Eux se faufilaient aisément dans les tunnels tandis que les américains, plus corpulents, progressaient bien lentement à l’intérieur. De ce fait,  ces derniers envoyaint des chiens, des Bergers Allemands, en espérant déloger les maquisards… Mais c’était sans compter sur les multiples pièges mortels des vietnamiens, où ils dissimulaient sous des trappes, une fosse de bambous acérés et empoisonnés…

L’ingéniosité et la ténacité des Vietnamiens ont donc donné bien du mal aux soldats Américains, pourtant plus nombreux et bien mieux armés.

Nous avons visité le site de Ben Duoc, où les tunnels ont été légèrement élargis et consolidés, afin de pouvoir accueillir les touristes occidentaux (un gabarit légèrement supérieur à celui du Vietnamien) sans aucun risque. Mais même ici, mieux vaut ne pas être trop claustrophobe. Nous avions du mal à progresser, à quatre pattes, sous la chaleur étouffante qui règne ici, à 3m sous terre… Et pourtant, des hommes sont restés ici des jours durant, lourdement équipés, menacés par les américains et leurs bombes qui explosaient juste au-dessus de leurs têtes. Largement de quoi terroriser donc !

De l’extérieur, tout est quasi invisible. Même les arrivées d’air ou échappement de fumée de la cuisine se font discrets dans de fausses termitières de terre et déportés à des dizaines de mètres des galeries, pour tromper l’adversaire. Seuls les énormes impacts des obus, ont parfois mis à jour de petites portions de galeries peu profondes.


Continuant notre route vers le nord, nous avons posé nos sacs dans la ville côtière de Mui Né, appréciée par les touristes et les locaux pour ses plages, bien entendu, mais aussi pour ses grandes dunes de sable rouge, toutes proches de la ville. Après une bonne grasse matinée et n’étant pas très branchés plage, nous avons décidé de louer un vélo pour nous rendre aux dunes au coucher de soleil.

 


Après avoir longé la côte sur plusieurs kilomètres nous y arrivons enfin : nous voici en plein désert... ou presque. En effet, bordant la route, de grandes dunes de sables d’une dizaine de mètres de haut se dressent au milieu des vertes collines voisines. Joli contraste ! Pour les amateurs de glisse, il est possible de louer un bout de plastique en guise de luge pour dévaler la pente. Nous nous contenterons de les parcourir seuls, à pied, une à une, (ce qui fatigue tout de même assez vite) alors que la plupart des visiteurs s’agglutinaient sur la première accessible ! Quelques photos plus tard, en voulant prendre le chemin du retour, nous retrouvons un de nos pneus à plat… Une crevaison à la tombée de la nuit, à plusieurs kilomètres de la ville, ce n’était pas vraiment la fin de journée espérée ! Sans attendre nous nous sommes tout de même mis en route, en poussant dans les montées et en essayant de se faire le plus léger possible dans les descentes jusqu’à trouver un gonfleur pneumatique… qui nous confirmera la crevaison ! Finalement assez vite arrivés en ville, nous nous arrêtons pour notre habituelle bière post galère (et accessoirement un copieux dîner) avant de rendre nos vélos, avec un pneu dans le même état que nous… crevé. 



Encore plus au nord, enfoncée dans les terres cette fois ci, à près de 1500m d’altitude se trouve la ville de Dalat. Peut-être enfin un peu de fraicheur ? Non, même pas ! Mais, en revanche, de la pluie, pour l’une des premières fois en pleine journée depuis notre arrivée en Asie, nous nous mettons même à l’abri (c’est dire !) ! Heureusement, l’intempérie n’a pas duré. Ici aussi nous avons parcouru les environs en vélo, quoique de manière un peu plus originale au début, puisque avons essayé le tandem… Sacré numéro de cirque ! Un tandem sans doute bien trop petit pour nous, nous sommes pliés en deux, les genoux dans le guidon, et pas toujours synchro… Après un rapide tour du lac, juste en contrebas du centre-ville nous avons troqué notre tandem contre deux bicyclettes (toujours trop petites) qui feront mieux l’affaire !

 

Nous avons pu nous balader dans les environs, en se rendant d’abord à la vallée d’Amour (en tout bien, tout honneur, bien sûr), un parc aux multiples sculptures de cœur fréquenté par les locaux. Pas vraiment notre tasse de thé. Juste à côté se tient le musée de la broderie, ou il est possible d’observer les brodeuses en action… Mais pas les weekends apparemment… Nous verrons tout de même de belles et grandes toiles entièrement brodées, dans cette ancienne maison au charme certain. Sur la route nous avons croisé plusieurs maisons au style colonial français, témoin du passé de la ville : de grandes villas aux toits à doubles pans arborent de simples volets (inexistants ici en Asie). Le dernier bâtiment à avoir attiré notre attention est la gare ferroviaire des années 30, ressemblant presque à une vielle gare de chez nous.

 


Le moment venu, un bus nous emmènera à plus de 500km au nord, dans la région centre du Vietnam.

Vietnam – Delta du Mékong

Grâce à notre visa Vietnamien, obtenu il y a quelques semaines de cela à Bangkok, le passage de la frontière n’a posé aucun soucis et nous sommes tranquillement arrivés à Ho Chi Minh, (l’ex Saigon). Mais à peine arrivés, nous repartons déjà, en direction du delta du Mékong et plus précisément de Can Tho, ville la plus au sud de notre itinéraire vietnamien.

Après une journée entière de transport, nous arrivons à destination dans la soirée accompagnés de deux Australiens, et espérons rapidement trouver où passer la nuit. Malheureusement la chance ne nous sourit pas, toutes les guesthouses affirment être complètes (pour cause de weekend…malgré que les rues soient vides) et nous envoient chez la voisine. Bien entendu nous finirons par trouver grâce à une dame (une rabatteuse ?) nous jurant que la seule chambre de libre de la ville se trouve dans cet hôtel… Une chambre pour quatre c’est tout de même un peu juste, donc on insiste et on obtient une seconde chambre (alors que la ville est censée être pleine…). Youpi ! On joue la meilleure chambre à Chifoumi contre les australiens, on la gagne et vite au lit.

Au réveil, nous décidons de nous rendre tout de suite au marché flottant de Cai Rang, situé 4km en aval de la rivière. Tout en refusant poliment les services des pilotes de pirogues nous proposant de nous y emmener, nous en prenons la direction à pied,  espérant pouvoir suffisamment s’en approcher et pourquoi pas embarquer sur une pirogue une fois sur place. Sur le (long) chemin, nous avons à plusieurs reprises croisé des marchés aux fruits et aux légumes où fourmillent les femmes aux fameux chapeaux coniques. Le marché enfin atteint, nous l’observons du rivage, tout proche, et il ne semble pas être très animé. Au cas où, nous essayons de négocier une pirogue chez un particulier pour quelques minutes… en vain. Ce marché en fait est un marché de grossistes, et est considéré comme le plus grand du delta du Mékong, peut-être sommes-nous arrivés après l’effervescence matinale ?

 

Afin de ne pas se limiter à cette seule expérience et surtout parce qu’on nous l’a conseillé, nous avons repris la route du nord jusqu’à une île voisine de la ville de Cai Bé et de son marché flottant. Le soir venu, un rapide tour de vélo sur la petite île nous a fait franchir de petits ponts au-dessus des canaux pour découvrir arbres fruitiers et maisonnettes dont les occupants nous saluaient encore de joyeux « Hello ! ». S’en est suivi un bon repas copieux et une nuit des plus reposantes !

Au matin, nous avions rendez-vous pour un tour guidé en pirogue des environs. Suivez le guide !

Tout d’abord nous avons troqué la pirogue pour une petite barque à rame, plus facilement manœuvrable dans les petits canaux de l’île que nous avons emprunté pour débuter la visite. De façon plus nette que la veille nous avons pu remarquer l’utilité de ces véritables « artères » que sont ces canaux : les locaux y circulent vraiment, ils y lavent leurs légumes… ou leurs enfants, et tout le long poussent de nombreux arbres fruitiers (dont le Jaquier, qui produit le jaque, un énorme fruit à l’écorce verte et granuleuse dont la chair jaune se mange [pas fameux à mon goût]).


De retour sur la pirogue nous avons traversé le marché flottant, cet autre marché de gros regroupe de nombreux bateaux remplis d’un seul et même produit, dont un échantillon pend au sommet d’une longue perche pour informer les acheteurs du contenu du bateau. Du manioc à la pastèque, en passant par le durian ou le fruit du dragon, bon nombres de fruits et légumes sont présents ici. Par chance, nous avons pu faire une dégustation de certains de ces fruits sur un bateau dédié. Au menu : pomme de lait, pomme d’amour  (rien à voir avec la nôtre), ananas, jaque, et un genre de litchi pas mauvais du tout, le longane.


 


Avant de terminer notre excursion, nous sommes passés par un centre artisanal ou de nombreuses gourmandises sont préparées et que nous avons, encore une fois, pu déguster. Pour la suite du menu : alcool de riz fermenté avec un serpent, caramel de coco, riz soufflé façon pop-corn, chips de manioc. C’est simple, tout est délicieux ! Après cela et la rapide visite d’une vielle maison sans grand intérêt, nous sommes retournés sur la terre ferme et avons poursuivi notre voyage en direction de Vung Tau (ou Cap St-Jaques… ?!), plus au nord sur la côte.


En arrivant dans cette station balnéaire bordée par la mer de l’est (ou de Chine), notre seule idée était de la quitter au plus vite pour l’île de Con Dao, qu’un ferry rejoint régulièrement en 12h de trajet. Peu  importe nous avons le temps… Du moins nous AVIONS le temps ! En effet, régulièrement ne veut pas dire « souvent » ni « quand vous le voulez », et nous avons donc eu le malheur d’apprendre une fois à l’embarcadère que le ferry ne partait que le lendemain. Le lendemain justement, de retour au port, on apprend que le ferry est plein, et que cette fois-ci on aurait tout intérêt à réserver pour le jour suivant… Bonne idée ! Sauf qu’après deux échecs et deux journées à patienter tranquillement dans notre ville de bord de mer, il était grand temps pour nous de bouger. (Même si Romain, lui, a eu le courage d’aller courir). Tant pis pour l’île sauvage. (Qui, pour les fans, a accueilli Koh-Lanta en 2010.)


Désormais, nous rentrons sur Ho-Chi-Minh pour continuer de découvrir le sud Vietnam.

lundi 13 avril 2015

Phnom Penh

Souo Sadai (bonjour en Cambodgien)

Arrivés tôt grâce à notre bus de nuit, une fois notre hôtel trouvé, nous avons directement pu partir à la découverte de la ville.

On ne peut pas vraiment dire que ce soit très « agréable » de se balader dans les rues de Phnom Penh. La plupart sont surchargées, le trafic routier est un désordre total, les trottoirs sont envahis de tout et n’importe qui (resto, vendeurs ambulant, tuk-tuk ou scooter stationnés, poubelles, etc…) vous obligeant souvent à marcher sur la route. Toutefois, ce qui reste drôle c’est l’imagination des Cambodgiens en ce qui concerne le transport : 5 sur un scooter (en sachant que l’âge minimum pour en conduire un semble être « quand les pieds touchent l’embrayage »… 10 ans donc…), des scooters avec 10 packs de bières coincés entre le conducteur et le guidon, ou des barres d’acier de 6m pendant à l’arrière, ou encore un passager tenant un pare-brise. Dans la catégorie 4 roues nous avons vu des mini-bus REMPLIS à ras-bord d’ananas, des mini-vans toujours, remplis aux quatre tiers avec encore un mec sur le toit pour tenir l’étagère qui ne voulait pas rentrer,  etc… Le tout dans une circulation anarchique ou tout est autorisé, et où la seule règle semble être « chacun pour soi ». Traverser une avenue à pied peut vite devenir un challenge.


L’après-midi, afin de compléter notre visite des temples d’Angkor, nous avons décidé de nous rendre dans un endroit beaucoup plus calme, le musée national des beaux-arts. En effet, grâce à la visite guidée que nous avons décidé de faire, et du nombre de reliques provenant de ce merveilleux site, nous avons pu anckor en apprendre un peu plus ! Par exemple, c’est ici que se trouve une copie du  linteau dérobé par Malraux. Nous avons aussi appris que lorsque dans une même famille hindouiste, certains souhaitent vénérer Shiva et d’autres Brahma, alors on se mettait d’accord sur une seule divinité composée à moitié de Shiva et à moitié de Brahma… d’où une statue avec un visage et une coiffe divisés en deux et travaillés différemment. Plutôt simple non ? Nous avons aussi pu voir la cabine de la barge royale, retrouvée dans le Tonlé Sap, le plus grand lac d’Asie du sud-est, véritable poumon vert et cœur du Cambodge. Une autre pièce intéressante est une grande urne funéraire dans laquelle était incinéré le roi défunt en position fœtale (ce qui oblige à sectionner les tendons !?) avant la cérémonie funéraire royale. Toutefois, elle n’a servi que deux fois.

La journée suivante fût chargée en visites et encore plus en émotion. Nous avons prévu de consacrer une journée entière pour essayer de comprendre le génocide enduré pendant les 3 ans, 8 mois et 20 jours de cauchemar et d’atrocités subies par le peuple Cambodgien sous le régime de Pol Pot.

Dans le but de mieux comprendre la suite de cet article et peut-être de vous faire découvrir une partie de l’histoire traumatisante de ce pays, voici un « bref » résumé de la situation cambodgienne entre 1975 et 1979.

En 1966, Sihanouk, chef d’état socialiste, voit le général Lon Nol accéder au poste de 1er ministre, soutenu par l’armée et la bourgeoisie de Phnom Penh, qui ont peur de la montée en puissance du socialisme. Sihanouk forme alors un « contre gouvernement », qui engendrera une totale anarchie dans le pays, suivie de conflits. Des groupes prosocialistes, appelés « Kmers rouges » par Sihanouk se réfugient dans les maquis et combattent les troupes gouvernementales. En 1970, le coup d’Etat d’un nouveau gouvernement encouragé par la CIA, destitue Sihanouk de ses fonctions, et invite le peuple cambodgien à la résistance. Ces derniers rejoignent les Khmers Rouges dans les maquis alors que le reste de la population se réfugie à la capitale, Phnom Penh. Les quatre années suivantes ne sont que guérillas et se finissent en 1975, lorsque la résistance, qui a déjà repris toutes les campagnes, reprend la capitale. Puis, rapidement, prétextant des bombardements américains imminents les « libérateurs » ordonnent à TOUS les habitants (nouveaux-nés, vieillards,…) de quitter la ville pour gagner les rizières afin d’assurer l’autosuffisance du pays (pays désormais appelé « Kampuchéa Démocratique »). L’Angkar, la nouvelle organisation suprême des Khmers rouges, en fait de même pour toutes les villes du pays. C’est « l’année zéro » !

« Il est plus facile de tuer un innocent par erreur que de laisser vivre un ennemi »


La population de la capitale (soit 2,5 millions de personnes à ce moment-là) puis, peu après, celle de toutes les villes du pays sont déportées en trois groupes : les militaires, représentant une menace potentielle, sont purement exécutés. Les « intellectuels » (en fait toute personne portant des lunettes, parlant une langue étrangère ou semblant juste être dotée d’un soupçon d’intelligence…) sont déportés, torturés jusqu’à ce qu’ils avouent une (fausse) liaison avec la CIA ou le KGB, et finalement exécutés dans des « villages spéciaux » (comme la prison S21 que nous avons visitée). Enfin, les autres, étant considérés comme « le peuple de base » sont conduit de force dans les rizières de leur village natal, et réduits au rang d’esclaves sous-alimentés, travaillant la terre à mains nues 12h par jour. Ceux qui ne sont pas exécutés se tuent rapidement à la tâche, exposés aux maladies et au soleil.

La prison S21 justement est en fait un lycée, abandonné et vidé comme beaucoup d’édifices publics ou religieux (hôpitaux, pagodes, etc…) Les bonzes et la communauté musulmane Cham sont eux aussi massacrés.


« A l’image d’un arbre, il faut attaquer le problème (le suspect) à la racine, (la famille donc, nouveaux nés compris) »


Pour encore plus de cruauté, quand un « suspect » est arrêté et exécuté, c’est très souvent aussi le sort de toute sa famille, femmes, enfants et vieillards compris… Les bébés sont tués, projetés contre les arbres, et les autres la nuque fracassée à la barre de fer ou à la pioche, par souci d’économie de munitions.

« D’où que vous veniez, imaginez que l’on exécute une personne sur quatre de votre pays »

La prison S21 ne pouvant contenir prisonniers et cadavres, et la macabre cadence augmentant affreusement, la décision est prise de déplacer le lieu d’exécution à  15km de là, sur le site de Choeung Eku, appelé aussi Killing Fields de nos jours, que nous avons aussi visité. Mais ce camp, qui comptera finalement près de 16 000 corps, n’en est malheureusement qu’un parmi beaucoup d’autres et les corps s’entassent dans les fausses communes aux quatre coins du pays. On estime à près de deux millions le nombre de victimes des Khmers Rouges.

Derrière ces abominables faits, se cache (parmi d’autres) un homme aux initiales marquantes, « S.S. », se fait appeler Pol Pot, et est un grand admirateur de Staline et ho surprise… d’Hitler !! En 1976 il accède au poste de premier ministre et met en place ses atrocités, à l’aide d’adolescents (endoctrinés plus facilement) issus des campagnes, et déjà réticents au pouvoir de Phnom Penh. Le personnage qui a marqué la prison de la capitale est sans aucun doute Duch, le tortionnaire en chef, directement responsable de plusieurs milliers de morts.


Seules 7 personnes sont sorties vivantes de la prison  S21 : parmi eux des enfants chanceux et des hommes ayant eu l’opportunité de pouvoir apporter quelque chose aux bourreaux en l’échange d’un peu de confort (nourriture suffisante, cellule personnelle, etc…) et surtout de la vie : par exemple, un dénommé Nath, peignait des portraits des grands responsables. Plus tard, il dessinera de mémoire des scènes marquantes de la « vie » en prison.

Finalement, c’est en 1978 que les Khmers Rouges, menaçant la frontière Vietnamienne sont chassés du Cambodge par l’armée voisine.

Ce n’est que début 2009 que s’est finalement ouvert le procès des khmers rouges, avec seulement cinq inculpés, certains ayant trouvé la mort depuis, comme Pol Pot en 1998. Après une première condamnation de 35 ans en 2010, c’est lors de l’appel en 2012 que Duch écope de la prison à perpétuité. C’est le premier verdict définitif de ces procès. Sur les quatre autres inculpés, un est mort en 2013 avant son procès (ancien vice-premier ministre du régime) et une autre (sa femme, ministre aussi) a été jugée inapte à endosser une condamnation pour trouble neurologiques. Enfin, les deux autres vieillards encore en vie, le bras droit de Pol Pot ainsi que le président de l’époque ont eu le droit (à la vue du nombre de chefs d’inculpations) à une procédure en 2 procès, afin qu’un verdict soit prononcé avant leur mort. Le premier verdict pour ces responsables de premier rang est tombé en Aout 2014 : prison à perpétuité ! Le second procès piétinait depuis des mois mais a repris en ce début d’année 2015. Affaire à suivre…. même 35ans après les drames !


En ce qui concerne nos visites nous avons tout d’abord commencé par le centre de ressources audiovisuelles Bophana, tout proche de notre hôtel, où il est possible de visionner plusieurs films à ce sujet. Nous en choisissons un, intitulé « Bophana une tragédie Cambodgienne » et portant malheureusement bien son titre… L’histoire vraie, tirée de confessions écrites, d’une femme et de son mari, déportés puis exécutés au camp S21.

 

Ensuite, nous sommes allés dans cette prison tristement célèbre, désormais transformée en musée. On a pu découvrir ces murs et ces minuscules cellules ayant accueillis des tas d’innocents, ces grandes salles vides dans lesquelles une quarantaine de détenus étaient entassés, où parfois dans lesquelles seul un lit de torture se trouvait… La grande majorité des balcons étaient fermés par des barbelés, afin d’éviter les suicides. Dans un autre bâtiment, des milliers de portraits de détenus photographiés à leur arrivée pour tenir un registre des arrivées et des « départs ». Certains étaient légendés de l’histoire de leur déportation faite par leurs proches. Poignant !




On a aussi pu admirer les peintures marquantes, presque choquantes (bien que moins réaliste qu’une photo) de Nath, l’un des sept survivants. On y découvre les différents moyens de tortures, fouet, noyade, arrachage des ongles, etc… Et aussi un autoportrait, dans sa petite cellule. Marquant !

Dans une autre salle encore, on voit comment d’ancien Khmers Rouges ont réussi à réintégrer une vie normale après cette tragique période. Certains sont devenus piroguiers ou agriculteurs, d’autres sont restées mères de famille. Sans doute une expo dans l’espoir d’une réconciliation du peuple cambodgien.


Puis nous avons parcouru la route que de trop nombreux prisonniers n’ont emprunté que dans un seul sens, celle qui mène jusqu’au camp d’extermination de Choeung Ek, appelé aussi Killing Fields.


Ici, les condamnés étaient exécutés de façon barbare, à coup de crosse ou de barre de fer, avant d’être entassés dans des fosses communes. Des chants communistes étaient diffusés suffisamment fort pour couvrir les cris des exécutés et ne pas effrayer les nouveaux arrivants. Les ossements de près de 9000 personnes ont été mis au jour, ne représentant que la moitié des corps enfouis. La pluie fait encore parfois remonter vêtements et ossements. Un grand mémorial a été érigé pour accueillir les crânes sortis de terre… et est rapidement devenu plein.


Voilà, c’est peut-être un peu violent pour découvrir une partie de l’histoire d’un pays, mais c’est certainement aussi la meilleure façon de se rendre compte de ce que le pays a enduré, et que cela ne soit jamais oublié.

Après une semaine passée (encore) bien trop rapidement, demain, nous quittons ce fabuleux pays qu’est le Cambodge pour le Vietnam.

mardi 7 avril 2015

Siem Reap - Les temples d’Angkor

Après une longue et fatigante journée dans un bus, pourtant confortable et bien équipé (même le WiFi !!) nous voilà enfin arrivés à bon port ! Siem Reap, ville toute proche des temples d’Angkor, site inscrit au patrimoine mondial de l’humanité ayant fait rêver plus d’un voyageur.

Avant de s’attaquer à la découverte et la visite des fameux temples, nous souhaitions avoir une petite introduction concernant ces monuments et cette période, tous deux historiques pour le pays.

C’est donc logiquement que nous nous sommes dirigés vers le musée d’Angkor pour notre première matinée, afin d’en apprendre un peu plus sur la civilisation Khmère, forte puissance de l’époque.

Nous découvrons alors une première salle, celle dite des « milles bouddhas », certains en pierre, d’autres en bois ou encore dorés, représentés dans différentes postures mais tous d’origines cambodgiennes et remarquablement bien conservés. Plus loin, des statues Hindoues aussi y sont conservées, comme Brahma, Vishnou ou Shiva, les 3 principaux dieux de cette religion. On y retrouve aussi des Nagas, ce serpent à 7 têtes protecteur des eaux est parfois représenté au-dessus de bouddha, le protégeant. Et enfin, les rois importants ayant forgé un empire dont cette merveilleuse cité en fût la capitale. Voici un peu d’histoire :

A l’origine, un royaume Cham, (Sud Vietnam et Sud Cambodge), Mon-Khmere (Cambodge et basse birmanie) et enfin Siam (Thailande). Au VIème siècle, un guerrier Khmèr prend le Mékong au Chams, puis son successeur gagnera encore du terrain puis fondera une nouvelle capitale, des villes et de nouveaux sanctuaires. Le Cambodge est né ! Ensuite, vers l’an 800, un certain Jayavarman II agrandit encore le territoire avant qu’un de ses successeurs, Yasovarman, fonde une énième capitale, le premier Angkor, (qui signifie « capitale » en langue Khmère). En 1113, un prince sans scrupule, Sûryavarman II, élargit encore le territoire Khmèr, au point qu’on parle désormais d’Empire Khmèr. A l’image de cette nouvelle puissance, il fait construire le plus majestueux des édifices : Angkor Wat, un temple dédié à… Vishnou, dieu suprême hindouiste ! Et oui, jusqu’à maintenant l’hindouisme est la religion prédominante dans l’empire. En 1177, une flotte Cham remonte le Mékong, s’empare du royaume et pille même Angkor. S’il ne faudrait retenir qu’un seul nom de rois, ce serait certainement celui-ci, Jayavarman VII (J7 pour les intimes), qui libéra rapidement le pays et rebâtit la cité d’Angkor. Il convertit l’ensemble de l’Empire au Bouddhisme, et éleva de nouveaux monuments telle que la ville royale, Angkor Thom, véritable ville dans la ville, qu’il protégea par de hautes murailles et de large douve. Il se fait aussi représenter au sommet du Bayon, « la montagne magique » et dresse de nombreux autres temples comme Ta Phrom, Preah Khan ou Banteay Prei… Par la suite, la cité vivra un fort déclin et sera peu à peu délaissée, abimée par le temps, puis même pillée par les Thaïlandais en 1351.

Une histoire chargée donc (pardon pour le pavé) mais qui nous laisse une grande quantité de merveilles qu’il nous est possible de découvrir aujourd’hui ! En avant !

Paradoxalement, pour commencer notre visite du site, nous nous sommes rendus en tuk-tuk en dehors de ce dernier, à 25km au nord, au temple de Banteay Prei, souvent délaissé par les touristes. Pourtant les gravures et autres bas-reliefs visibles ici sont sans doute les plus fins de tous, à tel point qu’on dit parfois que ce travail n’était faisable que par des femmes, donnant son surnom « la citadelle des femmes ». C’est d’ailleurs ce qui a certainement intéressé un français, André Malraux, qui vola plusieurs frontons sculptés, qui n’ont finalement jamais quitté le Cambodge. (Des frontons sont visibles au musée Guimet de Paris, et au musée d’art de Phnom Penh.) Malraux plaida le « Res Nullius » (le délit est nul puisque l’objet n’appartient à personne. Pardon mais voilà ce que c’est de fréquenter une juriste…)







 

Le lendemain, il était temps de se lancer à la découverte des principaux sites. Une multitude de façon de visiter le site existe, en tour organisé, en trouvant un guide, en tuk-tuk, en scooter, en vélo… Pour notre part, ce sera vélo, en essayant de trouver un itinéraire et des heures nous permettant d’éviter les cars de touristes (chinois) se déversant devant les temples !
A 4h30 donc, nous étions devant notre loueur de vélo, averti la veille de notre passage matinal, et pourtant obligé de taper au carreau pour qu’il daigne nous ouvrir. Quatre kilomètres séparent la ville de Siem Reap, où nous logeons, du site d’Angkor ; il nous faut donc les parcourir à la lueur des lampes frontales… Juste le temps d’une mise en jambe ! Nous prenons le chemin d’Angkor Wat, le plus célèbre des temples, avec l’idée d’y voir le lever de soleil et d’en profiter avant l’arrivée d’un trop grand nombre de touristes.

Sur place bien sûr nous ne sommes pas les seuls à avoir eu cette idée-là, et les touristes orientés (ou poussés) par les guides (ou rabatteurs) s’agglutinent déjà proches des restaurants et d’un bassin d’où la vue est parait-il meilleure. Nous avons préféré nous isoler un peu plus loin avec à peine une dizaine de visiteurs, pour profiter du calme du lieu.

Un peu en avance sur le soleil, et voyant tous ces touristes restés assis en attendant les premiers rayons de soleil j’ai décidé d’en profiter pour faire un tour du propriétaire. J’ai donc traversé les galeries, traversé une cour, monté des escaliers pour finalement atteindre la base du sanctuaire dont j’ai pu faire le tour. Et le tout, sans croiser âme qui vive ! Personne, nadie, no-one ! Quel BONHEUR de se retrouver seul, absolument seul, dans un tel temple, à découvrir son architecture, son immensité et sa finesse à la lueur de ma lampe ! Impossible de ne pas penser à un rêve de gosse, celui de devenir « explorateur ».


Après 15 petites minutes à l’intérieur il est temps d’avertir Romain de cette aubaine qui en profitera lui aussi à son tour, seul, un petit moment ! Nous voilà deux déjà plus que ravis ! Et ce n’est que le début, puisque s’en est suivi, grâce à l’orientation est-ouest du temple, l’agréable spectacle du lever de soleil derrière les tours.

Débuté au XIIème siècle, juste avant Notre Dame de Paris, la construction a duré près de 37 ans avec l’aide de 300 000 ouvriers et pas moins de 6 000 éléphants. Sacré chantier donc ! La tour centrale, de forme phallique, symbolise Vishnou ; les murs d’enceinte représentent le Mont Meru, centre de l’univers pour les Hindous. Tous les murs sous les galeries, sur chacun des 4 côtés, soit quelques 800m, sont gravés sur 2m de haut. Autant de gravures et de représentations de l’histoire à déchiffrer et interpréter. A défaut de pouvoir vous les expliquer précisément, en voilà tout de même quelques-unes : des scènes du Ramayana, des représentations de Hanuman et de son armée de singes, mais aussi des dieux hindoues comme Râvana, Shiva ou Indra. Même le roi batisseur du temple, Sûryavarman II y est représenté. La plus importante est la fresque représentant « le barattage de la mer de lait », scène énormément représentée à travers tout Angkor. En deux mot : Démons et dieux hindous tirent chacun d’un côté  puis de l’autre sur le serpent Naga, autour du mont Meru, créant ainsi un nectar d’immortalité (épisode primordial de la création de l’univers), et faisant apparaître en autres des Apsaras (des nymphes). Le tout, sous les yeux de Vishnou, se préparant à devenir immortel.

 


A midi, nous nous sommes arrêtés au niveau de petites gargotes où les femmes vous invitent à venir manger chez elles en criant à plus de 50m de vous… Un vrai sketch au début… puis on s’y fait ! S’engagent alors un vrai jeu de négociation, pour savoir qui offre le plus aux tarifs le plus bas : 2 bouteilles d’eau pour 1$ ? 2$ le plat si tu m’offres une canette ? On a pris 2 assiettes chacun, tu nous offres les chips ? Bref, il est très facile de diviser les prix incroyablement hauts de la carte par 2 ou 3… On se demande encore si des touristes fortunés paient les prix du menu ?!

Pendant que nous sirotions notre soda, nous avons pu observer des macaques se balader le long de la route, toute proche. Tout en me méfiant d’eux, j’ai rangé nos affaires dans le sac juste avant que l’un d’eux ne s’approche, puis grimpe rapidement sur la table en s’emparant de la canette de Romain. Il s’est ensuite écarté de deux petits mètres pour siroter sa canette (sans la paille tout de même) en montrant les crocs à Romain dès qu’il voulut la récupérer. Une fois rassasiés, nous n’avons pas pu résister à la sieste dans un hamac (surtout moi… 1h30…), laissant filer les heures les plus chaudes de la journée.

En poursuivant notre route le long de la grande boucle nous avons croisé plusieurs temples, tous plus enchantant les uns que les autres. Rassurez-vous, je suis incapable de donner des explications sur chacun d’entre eux, bien que les dieux vénérés varient. Disons que l’architecture et le cadre change, mais les représentations divines et scènes mythiques sont (pour nous, novices) régulièrement les mêmes, avec plus ou moins de détails et de finesses.

Dans l’ordre, voici nos différents arrêts : le Preah Khan, un temple ayant été une grande ville antique et autrefois très animé, c’est aujourd’hui un immense temple en ruine, envahi par la végétation et les fromagers, ces arbres aux racines surdimensionnés qui pénètrent entre les pierres et disloquent des murs entiers. Neak Pean, un sanctuaire isolé sur une toute petite île au milieu d’un bassin, autrefois occupé par des bonzes (des moines bouddhistes) et rempli d’eau à la saison des pluies. Pre Rup, grande pyramide de briques que nous avons visitée aux dernières lueurs du soleil, juste avant de rentrer prudemment mais rapidement, de nuit.


Le jour suivant, nous avons encore une fois devancé le soleil, même si cela a été sincèrement plus difficile que la veille. Nous reprenons nos vélos et arrivons sur le site de Ta Phrom juste pour l’aube, un superbe site en ruine (bien qu’en restauration), encore bien abandonné à la jungle et aux énormes arbres fromagers (appelés ainsi car autrefois utilisés pour faire des paniers à fromages). Pour les cinéphiles, il paraitrait que le film Lara Croft avec la belle Angelina Jolie ait été en partie tourné ici. A vous de me confirmer, connais pas !

 



Notre dernier arrêt a été Angkor Thom, la célèbre cité fortifiée fondée par J7. Avant d’accueillir tous ces cars et scooters de touristes de passages, cette ville abritait au moyen-âge pas moins de 100 000 personnes. En pénétrant dans l’enceinte par une des cinq portes monumentale de plus de 20m de haut, on se retrouve rapidement face à la pièce maîtresse de cette forteresse, le Bayon. Cette « montagne magique » comme son nom l’indiquerait, est une telle prouesse architecturale qu’il est difficile de ne pas s’y perdre. Pour vous donner une idée de la taille du monument, voici quelques chiffres : Pyramide de trois étages, culminant à près de 43m, elle était composé de 54 tours (mais seules 37 ont résisté aux assauts du temps). Au sommet de chacune d’elles, sur chacun des 4 côtés, un énorme visage, soit autrefois précisément 216 visages ! Ce temple a été construit à l’époque de transition entre l’hindouisme et le bouddhisme et regroupe donc beaucoup de divinités adorées par les deux religions et donc tout l’empire Khmèr.




Le Baphuon, bien que se trouvant dans l’enceinte d’Angkor Thom, a été construit au XIème siècle et était donc là avant la ville fortifiée. Il était aussi un des plus grands monuments de l’époque. Son style particulier et ses escaliers vertigineux pour atteindre le sommet en fond un temple unique, qui plus est grâce au gigantesque Bouddha couché entrant en nirvana de 60m de long.


Toujours à l’intérieur de l’enceinte on aperçoit le palais royal, (autrefois en bois, et donc aujourd’hui poussière ! Seules les divinités avaient le droit à une construction en dur). Il y aussi deux terrasses, celle dite des éléphants et celle du roi lépreux (J7 serait mort de la lèpre), toutes deux embellies par de nombreuses gravures et sculptures.

Il est temps pour nous de partir, après ces nombreuses heures à arpenter les fameux temples d’Angkor, que nous avons plus qu’appréciés, complètement charmés par la sensation de paix et de sérénité qui règne aux premières heures du jour dans ces temples livrés à la nature.


Après un léger repos et une bonne douche, nous grimpons dans notre hôtel-bus pour y passer la nuit en couchette. Direction : Phnom Penh, la capitale.